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ADULT. a fait buzzer toutes les lips
Ce samedi était résolument gai : une journée dédiée à la Gay Pride, de l’amour en barre, des couleurs arc-en-ciel, et de la bonne humeur en tube dans tout Bruxelles. Pour clore cette fête, le collectif Buzz On Your Lips proposait un événement de choix tout en contrepied d’ambiance : ADULT., mythique duo électroclash de Detroit, au Magasin 4 !
Crédit photos: Carolyne MissdigrizL’event tant attendu, dès 16h, était sold-out à la FNAC – seule une centaine de tickets étaient encore disponibles à 20h à l’entrée de la salle, et pour cause: ADULT. sortait, quatre jours plus tôt, son dernier album The Way Things Fall.
22h : la soirée a déjà débuté et la djette Elodie est sur scène. Le ton wave de la soirée est donné.
La salle se densifie à l’arrivée de Covox, dj suédois qui peu à peu, transforme le lieu en dancefloor electro totalement azimuté : VJ set, laser lights et grosses lignes de basses chauffent le public bigarré présent, déjà émoustillé par la before du jour. Le set se termine par une clameur unilatérale…Humide.
Petite pause dehors pour profiter des derniers rayons de soleil, assez rares ces derniers temps. Déjà, une vague rumeur se hisse à mes oreilles : il se pourrait qu’ADULT. annule son set pour cause de Jup’ déversée sur leurs synthés. Bullshit ! Personne n’y croit vraiment et pourtant…
Qui de l’eau ou de la bière…
Retour à l’intérieur – je m’incruste aux premières loges. Sur scène, Covox seconde Adam Lee Miller qui a les mains sur la tête. Tous deux bataillent avec les touches plus que moites de l’un de ses claviers. La crainte se propage. A priori, j’ai raté une annonce au micro de l’orga, annonçant un problème technique quelques minutes auparavant… No, no, no !
Aux interrogations tourmentées, le staff annonce d’un signe de main encore dix minutes de turpitudes. Dès lors, ça spécule dans tous les sens, moult versions de la cause dudit souci se déversent: Covox hyper jouasse et reconnaissant aurait terminé son set en arrosant d’eau son auditoire transpirant de décibels et par la même, une partie du matos de la tête d’affiche, ou bien des « dumbass guys on the public with jumping beers » dixit Nicola Kuperus, la chanteuse de ADULT., qui apparaît enfin.
Entre nous, on s’en fout, le résultat est le même : le set démarre sur une bonne carafe d’incertitude.
We are very professionals !
Finalement, le show electroclash démarre… Tant bien que mal : Nicola pose l’ambiance avec un rappel à l’ordre qui donne à peu près ceci : « We are very professionals ! Liquids on stage are a real badtrip for us, so keep that just for your face, guys, be quiet, please ! »
Réaction mitigée côté public : certains beuglent à l’injustice, d’autres sont pleins d’empathie et on entend même un « Avant, vous étiez punks, AVANT !!! »
Comme à l’écoute des albums de ADULT. un dimanche pluvieux de grosse descente – que celui ou elle qui ne s’est jamais retrouvé dans cette configuration me jette la première bouteille de SPA ! – une certaine tension s’instaure.
Dark Mood
Après quelques soundchecks, plantages et rebranchements de fortune, le duo entame son premier morceau, extrait de leur tout dernier album. En contraste à la journée placée sous le signe du rainbow flag, c’est un habillage Total Dark Lights sur la scène, baignée d’obscurité et d’un épais smog de fumigènes.
Il ne faut pas être né ingé’ son pour s’en rendre compte : ça patauge quelque peu côté technique, les claviers ne répondent pas forcément comme ils devraient, Miller et Kuperus s’échangent des infos et des moues dépitées entre deux vocalises nonchalantes.
Chaque morceau est ponctué d’annonces au micro, esprit Lost in la Mancha : « Sorry guys, we’ll try to make the show because we love you… But we got some problems with our wet stuff ! »
Anxiety, Always !
S’en suit ce titre anxiogène Blank Eyed, Nose Bleed tiré de l’album Anxiety Always, sorti il y a dix ans déjà, à l’époque où l’electroclash régnait en maitresse dominatrice dans les clubs : Miss Kittin & The Hacker, Le Tigre, Chicks on Speed ou Carretta tournaient sans cesse en tête d’affiche au Razzmatazz, club incontournable de Barcelone…
Trêve de douce nostalgie révolue. Nous sommes en 2013 et sur scène, la frontwoman s’emploie frénétiquement à faire le ménage: nerveusement, elle s’agace des fringues, canettes et autres brols laissés en deposit sur l’avant de la scène. Elle les piétine sciemment, soulève un sac à dos l’air circonspecte, puis balance le reste en vrac dans la salle. Le malaise, ça s’entretient et elle fait ça bien.
Après un énième bidouillage des machines et Shari Vari : morceau hommage au groupe phare de la techno à Detroit, A Number Of Names. Nicola s’accroupit pour aider son comparse à rebrancher mille câbles enchevêtrés, ramasse et revêt ce qui semble être une veste en cuir, dégoulinante de jus de fêtetypiquement belge, l’air mi-amusée, mi-écœurée. On ne sait pas ce qui se passe dans sa trombine mais on sent bien un truc assez latent et nocif arriver.
Take it easy!
Juste après, on fini par reprendre notre souffle : apparemment décidée à prendre tout ça à la cool, elle s’amuse à chiper la visière d’une nénette du public. Celle-ci s’empresse de rejoindre Nicola sur scène et d’improviser un duel déhanché aussi improbable que sexy.
Après d’autres tracks tirés de Gimme Trouble et quelques slams improvisés de fans, le paroxysme dun’importe quoi se concrétise par une gonze visiblement éconduite par Miller… Et surtout super bourrée : celle-ci, en dépit de la sécu débordée, grimpe sur le stage pour tenter de galocher son élu. Ce dernier la repousse tant bien que mal, elle s’emmêle les pied dans les câbles, débranche tout au passage sans s’en rendre compte.
Lost in la Mancha
À ce moment, facepalm mental de ma part, comme un peu tout le monde d’encore conscient dans l’auditoire. Nous sommes tous à peu près sûrs que tout ça va mal se terminer. Le groupe, toujours à quatre pattes, tente de rebrancher le bouzin. Nouvelle annonce qui se résumerait en 4 mots « Please… Don’t be stupid ! » Mais c’est beaucoup demander en cette soirée de grosse débauche printanière.
Au morceau suivant, c’est le micro qui lâche. Nicola se confond en excuses, même si on sent en arrière fond le pétage de plomb en règle se profiler, doucement mais surement. Bingo : en plein milieu d’un couplet, elle marque un temps d’arrêt et lâche un « I’m really pissed of ! » Le micro est balancé à terre, le groupe quitte la scène, rideau.
Show must go on…
L’orga et le staff tentent de temporiser par le démarrage précipité d’un DJ set afin d’éviter un silence pesant.
La crise d’angoisse a bien eu lieu, comme une promesse tenue. Certains tentent de transmettre des messages de soutien et d’amour à Nicola, qui multiplie les allers et venues pour ranger le matos abimé, mais une autre partie du public semble légèrement nier l’esclandre sur le dancefloor, même lorsque Miller réapparait brièvement une dernière fois sur scène en hurlant de rage.
The show must go on!, et tout ceci en fait peut être aussi partie, en fait… Chapeau bas, Buzz on Your Lips!